MIP Kubrick — Entretien avec Grégoire Bienvenu

«Avec ce module pédagogique, nous voulons faire de la recherche action et de la recherche création.»

Dans cet entretien, le chercheur Grégoire Bienvenu décrit le MIP qu’il a co-conçu autour de l’oeuvre et des archives de Stanley Kubrick à l’attention des étudiantes et étudiants de Nanterre.

Culture Media Lab : Comment avez-vous commencé sur l’œuvre et les archives de Stanley Kubrick ?

Grégoire Bienvenu : Nous sommes deux avec Jordan Derrien à l’organiser. Je suis en quatrième année de doctorat, et lui est artiste visuel et chargé de cours au London College of Communication. Il m’a parlé des archives de Stanley Kubrick qui sont hébergées dans son école, ses archives personnelles. À Paris, la Contemporaine, qui a un fonds d’archives sur les guerres et sur les conflits sociaux du XXᵉ siècle, notamment des affiches, nous a intéressés. Nous avons voulu les questionner en parallèle, pour remettre en contexte l’œuvre de Kubrick avec la période contemporaine. Car oui, son œuvre a ceci de spécial qu’elle dure. Enfin, je travaille beaucoup dans ma recherche de thèses sur des objets qui ne sont pas nécessairement numériques, comme l’affiche. Nous voulions penser le devenir de l’affiche, sa nécessité encore aujourd’hui ainsi que les pratiques de sa conservation.

CML : Comment est née l’idée d’organiser un MIP pour les étudiants ?

GB : J’ai été enseignant à Nanterre pendant deux ans et j’avais envie de continuer dans l’enseignement en parallèle de la thèse. J’ai parlé à Marta Severo de monter un module projet international et elle a mentionné la possibilité de candidater pour un MIP auprès d’Artec qui l’a accepté. Ce MIP s’intègre dans le parcours de Master II Communication Rédactionnelle Dédiée au Multimédia.

CML : Quelle est l’idée principale proposée aux étudiants et comment est-ce qu’ils et elles interagissent avec l’œuvre et les archives du cinéaste ?

GB : Tout d’abord, l’objectif est de les amener à travailler avec des archives : faire des recherches, manipuler des documents, découvrir des espaces, des façons de travailler qui ne sont pas nécessairement connus de leur part. Ensuite, se questionner sur l’œuvre de Kubrick et le medium de l’affiche. Nous voulons faire de la recherche action ou de la recherche création : toutes ces recherches doivent mener à une production originale qui prolonge toutes ces réflexions. Ici, ce sera sous la forme d’un poster. Enfin, nous insistons sur le volet franco-britannique, avec des sources mixtes et un des lieux d’exercice du MIP en France et en Angleterre et dans deux langues.

CML : En quoi consiste précisément le travail avec les archives ?

GB : Nous passons trois jours ensemble. Le premier, nous sommes à La Contemporaine, au contact d’archives sur la Première Guerre mondiale et la guerre du Vietnam, qui seront mis en parallèle de plusieurs films de Kubrick, toutes sortes de documents, des affiches, des photos, des coupures de presse qui vont de 1914 à aujourd’hui. Le troisième jour se passe à la Cinémathèque, au contact d’archives présélectionnés, de photos de tournage, de photos de plateau. Ce sont des affiches, des échanges épistolaires. À Londres, ce sont deux demi-journées sur le campus de la LCC qui sont dédiées à la manipulation de l’archive, la sélection de documents et l’observation. Il est impossible de tout voir de ces fonds, donc il leur faut faire des liens, filtrer, questionner les formats et les objets.

CML : Quels sont les développements à venir de ce travail ?

GB : Le rendu attendu est double. Les étudiants doivent proposer une affiche qui fasse écho aux réflexions qui ont été menées au cours de ces deux fois trois jours. À côté de l’affiche, on demande également une argumentation qui explique le travail de réflexion engagé, les résultats, et cetera, dans les deux langues. Ensuite, ils ont la possibilité d’une carte blanche créative : repenser un casting de films aujourd’hui, imaginer une campagne de promotion dans un territoire, en lien avec l’œuvre. Quand tout ça sera mené à son terme, nous aimerions en faire une exposition avec les œuvres des étudiants, ainsi qu’une publication.. Et poursuivre l’an prochain avec plus d’interactivité vers le Royaume-Uni, en faisant des binômes d’étudiants des deux côtés de la Manche.

CML : Ce travail vous a-t-il amené à penser de nouvelles pistes sur l’œuvre de Kubrick ou sur la place du cinéaste ou de l’affiche ?

GB : On s’est rendus compte que la grande partie des étudiants n’avaient jamais vu un film de Kubrick. Un seul d‘entre eux avait déjà traité et manipulé des archives. Et aucun n’avait visité la Contemporaine ou la Cinémathèque. Les terrains sont donc nouveaux pour eux, ce qui suscite de l’enthousiasme. Et ce MIP nous permet de répondre à notre curiosité aussi, en même temps que celle des étudiants. On apprend au moins autant qu’eux.

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